Vers (frz)
VERS, (Poésie.) [Poésie] Jaucourt (Page 17:158)
VERS, (Poésie.)
un vers est un discours, ou quelque portion d'un discours, dont toutes les syllabes sont réglées, soit pour la quantité qui les rend breves ou longues, soit pour le nombre qui fait qu'il y en a plus ou moins; quelquefois même elles le sont pour l'un & pour l'autre. Il y a des vers latins dont les syllabes sont réglées pour la quantité & pour le nombre: comme l'asclépiade, l'hendécasyllabe. Il y en a qui ne le sont que pour la quantité seulement, comme pour les héxametres. Les vers françois ne le sont que pour le nombre des syllabes.
On sait que les latins nommerent ainsi le vers, parce qu'il ramene toujours les mêmes nombres, les mêmes mesures, les mêmes piés; ou si l'on veut, parce, quand on l'a écrit, fût - on au - milieu de la page, on recommence la ligne. Il appellent versus, tout ce qui est mis en ligne; ce qui par - là faisoit ordre.
Une mesure est une espace qui contient un ou plusieurs tems. L'étendue du tems est d'une fixation arbitraire. Si un tems est l'espace dans lequel on prononce une syllabe longue, un demi - tems sera pour la syllabe breve. De ces tems & de ces demi - tems sont composées les mesures: de ces mesures sont composés les vers, & enfin de ceux - ci sont composés les poëmes. Voyez donc Poeme, & ses différentes especes; voyez Poésie, Vers (Poësie du) Poete, Versification, &c. car il ne s'agit ici que de la définition des vers en général; les détails sont réservés à chaque article particulier.
J'ajouterai seulement qu'avant Herodote, l'histoire ne s'écrivoit qu'en vers chez les Grecs. Cet usage otoit très - raisonnable, car le but de l'histoire est de conserver à la postérité le petit nombre de grands hommes qui lui doivent servir d'exemple. On ne s'étoit point encore avisé de donner l'histoire d'une ville en plusieurs volumes in - folio; on n'écrivoit que ce qui en étoit digne, que ce que les peuples devoient retenir par coeur, & pour aider la mémoire on se servoit de l'harmonie des vers. C'est par cette raison que les premiers philosophes, les législateurs, les fondateurs des religions, & les historiens étoient poetes. (D. J.)
Quelle: Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, 17:158 (Paris, 1765).